Midis de l'ARES

La façon dont l'égalité entre les femmes et les hommes traverse les différents types de recherche (fondamentale, appliquée et artistique) remet en cause le système même de la recherche. Le fil rouge de ce Midi, introduit, animé et conclu par Nicole Dewandre (Commission européenne) : chausser les lunettes du genre pour questionner ce système ; changer son regard sur la difficile prise en compte de la question du genre dans les agendas et la pratique de recherche.

Non, pour Nicole Dewandre, il ne manque rien aux femmes. C'est à la recherche à évoluer, pour son propre compte et pour celui d'une plus grande égalité, entre les formes de recherche et entre les femmes et les hommes.

Et si finalement les femmes avaient raison de bouder la recherche ?  

La carrière de chercheur pâtit d’inégalités de genre qui résultent moins d’une discrimination directe et explicite que d’une gendered-organisation  agissant comme un filtre caché. C’est ce qu’estime Bernard Fusulier, (UCL) pour qui la recherche est pensée dans un régime comptable-productiviste court-termiste qui relève davantage de la gestion d’entreprise que de la recherche fondamentale. En assimilant, au nom de l’excellence, le « plus » au « bon », ce régime non seulement va à l’encontre des principes de la recherche fondamentale, mais il accentue la pression sur les chercheurs et renforce la tension travail/famille.  

Bernard Fusulier prône une alter-excellence, où la qualité prime sur la quantité ; une alter-excellence qui soutient la prise de risque intellectuelle et tient compte du rythme de la production scientifique. Elle permettrait aux chercheurs de mieux contrôler leur vie professionnelle et de l’articuler plus harmonieusement à leur vie privée, et ainsi de favoriser le déploiement de carrières scientifiques plus neutres sur le plan du genre.

La recherche en haute école concilie-t-elle mieux vies familiale et professionnelle ?

Pour Birgit Quinting (HELMO), la recherche appliquée en haute école se distingue de la recherche pratiquée à l’université : elle s’y organise principalement sous la forme d’un détachement pour une mission définie, rarement à temps plein, et comme une parenthèse à la fonction principale d’enseignant. Pas ou très peu de postes permanents y sont dédiés ; la détention d’un doctorat et les séjours à l’étranger ne sont pas des passages obligés. 

Ces différences auraient-elles une influence favorable sur le rapport femmes/hommes dans la recherche appliquée en haute école ? Pour répondre à cette question, Birgit Quinting brossera un état des lieux, sur la base de statistiques, d’illustrations et de témoignages.

La recherche artistique et le genre : comment les femmes passent-elles de l'autre côté du miroir ?

L'articulation arts-recherches-genres ouvre, quant à elle, des perspectives nouvelles et inattendues, des lieux d'invention du futur, « de l'autre côté du miroir ». Pour Laurence Rassel (École de recherche graphique), la recherche artistique est basée sur une dynamique et une remise en question constantes et non sur le suivi d'un même modèle. Elle est un espace de liberté où tout est possible. Cette vision s'oppose à celle d'espaces où peut régner l’assimilation ou la domination.

Laurence Rassel partagera cette vision et son expérience de la recherche artistique en relation avec le genre. Elle parlera de l'exclusion lorsque la recherche artistique ne s'inscrit pas dans une forme précise et prédéterminée. Finalement, deux problématiques ne coexistent-elles pas : la définition de la recherche artistique, d’une part, et le genre, d’autre part ?

Le déni du genre dans la recherche : une forme moderne d’obscurantisme ?

En 2011, la Commission européenne a confié deux missions à un groupe d’experts : fournir aux scientifiques des méthodes pratiques d’analyse de genre et de sexe et produire des case studies  illustrant comment cette analyse peut mener à une véritable excellence. Car des biais de genre ou de sexe peuvent être grandement dommageables à la recherche, non seulement dans le domaine de la santé, mais aussi dans d’autres domaines, tels que les transports, l’environnement, la nutrition ou les technologies de l’information.

À partir des travaux de ce groupe d'experts, Viviane Willis-Mazzichi (Commission européenne) montrera comment l’analyse du genre a été prise en compte dans Horizon 2020, le programme européen de financement de la recherche et de l'innovation, en faisant coexister les deux objectifs d’égalité et de qualité.

 

Lectures et sites web d’intérêt :

Ressources :

Présentations :

 

Qui ? 

Introduction, modération et perspectives : Nicole Dewandre
Past-cheffe de l'unité « Femmes et sciences » de la DG Recherche de la Commission européenne, elle a initié la responsabilité de l’action européenne « femmes et sciences » entre 1997 et 2003. Elle est actuellement conseillère à la DG CONNECT sur les aspects sociétaux du marché unique numérique. Ingénieure, économiste et philosophe, elle est l’auteur d’ouvrages et de contributions philosophiques, en particulier sur l'administration européenne (Critique de la raison administrative, pour une Europe ironiste, Paris : Seuil, 2002) et sur la perspective sociétale de l'hyperconnectivité (The Onlife Manifesto, Rethinking the Human Condition in a Hyperconnected Era: Why Freedom is Not About Sovereignty But About Beginnings, Springer International Publishing).

Intervenants :

  • Bernard Fusulier, directeur de recherches du FNRS, professeur à la faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication, et membre de l’Institute for the Analysis of Change in Contemporary and Historical Societies (IACCHOS) de l’Université catholique de Louvain (UCL).
  • Birgit Quinting, maitre-assistant à HELMO - Haute École libre mosane, catégorie paramédicale, section Biologie médicale , coordinatrice de plusieurs projets de recherche dans le champ du diagnostic biomédical et de la pédagogie de l’enseignement supérieur, responsable de la cellule recherche des catégories paramédicale et technique de HELMO, président de l’assemblée générale du CRIG (Centre de recherches des instituts groupés de HELMO).
  • Laurence Rassel, directrice de l’École de recherche graphique (erg) École supérieure des arts, membre de l’asbl Constant Association for Art and Media, directrice de la Fundacio Tàpies à Barcelone de 2008 à juin 2015, coresponsable en 2006, avec l’asbl Sophia, d’un projet pilote d’intégration des études de genre dans l’enseignement supérieur artistique. 
  • Viviane Willis-Mazzichi, cheffe du Secteur Genre, DG Recherche & Innovation de la Commission européenne. Le Secteur élabore la stratégie d’égalité entre les femmes et les hommes dans la politique européenne de recherche et d’innovation selon trois axes : les carrières scientifiques, la participation dans les prises de décision et l’intégration de la dimension genre dans le contenu de la recherche.

Quand ? 

Mardi 4 octobre 2016, dès 11h30 - Fin à 14h 

Quoi ? 

11h30 : accueil des participants – sandwiches lunch

12h00 : introduction par Nicole Dewandre

12h30 : débat avec les 4 orateurs: 

  • Bernard Fusulier : Et si finalement les femmes avaient raison de bouder la recherche ?
  • Birgit Quinting : La recherche en haute école permet-elle mieux de concilier vies familiale et professionnelle ?
  • Laurence Rassel : La recherche artistique et le genre : comment les femmes passent-elles de l'autre côté du miroir ?
  • Viviane Willis-Mazzichi : Le déni du genre dans la recherche : une forme moderne d’obscurantisme ?

A partir de 13h15 : débat modéré par Nicole Dewandre

13h45: conclusion et perspective dressées par Nicole Dewandre

 

Où ? 

ARES, rue Royale 180 (5e étage) à 1000 Bruxelles

 

Actualités
Actualités